Une chambre à soi

LA LANGUE EST UN BIEN DANGEREUX

La Parole déjouée, du langage à la langue

Josef LUDIN - 1 juin 2010 - Source

La langue, disait le poète Höderlin, est le bien le plus dangereux de l’homme. C’est par la langue que les hommes racontent des mensonges, racontent des bêtises, déforment la réalité. C’est par elle que les êtres humains déclarent leurs amours, leurs amours qui netiennent pas longtemps. C’est elle l’organe de nos idéologies les plus atroces et fausses. Elle révèle et à la fois elle cache, elle dissimule, elle déforme. Mais elle console aussi, elle dit n’importe quoi et en même temps c’est par la langue que la vérité se dit. La langue est un bien dangereux et nulle expérience ne nous démontre plus son danger que l’expérience de la cure analytique. Le silence et l’abstinence de l’analyste dans la cure peuvent être considérés de ce point de vue : ils pèsent sur des mots comme s’ils voulaient toujours mesurer la valeur de la parole énoncée. Lire la suite

Comment qualifieriez vous la langue française ?

Xavier NORTH, commissaire principal du parcours permanent de la Cité internationale de la langue française de Villers-Cotterêts - 24 février 2024 - Source

D’abord c’est une langue de désir. Pour moi, sa beauté a quelque chose d’inaccessible. Peut-être parce qu’elle est très codée et qu’on ne la parle jamais assez bien ; on n’est jamais à sa hauteur. C’est ce qui la lie à cette notion de désir. D’ailleurs, ce qu’il y a de plus beau en français, ce sont des textes d’amour, de Racine à Aragon. D’un point de vue moins subjectif, le français me paraît également être un élément de citoyenneté, c’est vraiment notre socle commun. Je le dis souvent : de tous les liens que nouent les hommes au sein de la cité, le lien de la langue est le plus fort, parce que c’est lui qui fonde véritablement le sentiment d’appartenance à une communauté. Lire la suite

Ce manque qui est notre lot

Charles Juliet - mai 1984 - Source

Il ne faut jamais perdre de vue ce manque qui est notre lot. Cette attente dont on ne sait pas trop quoi, que rien ne vient combler. […] Pour moi, cette soif de plénitude est une réalité constante. J’écris pour essayer d’atteindre cela, et même en sachant que je n’y parviendrai pas, je sens que ma vie entière sera soumise à cette soif. Tout me semble impliqué dans cette aventure-là. On ne trahit rien en la vivant. Depuis que j’écris, je suis à la recherche de cette connaissance, qui, plutôt qu’un savoir d’ordre intellectuel, est un état de lumière et de vastitude. Il s’agit parfois d’une extrême légèreté intérieure où l’on se sent apte à comprendre ce qu’ont éprouvé les grands mystiques. Il est vrai que, en revanche, il y a des moments d’aridité où toute référence s’effondre, où on n’est plus souffrance. […] Un écrivain se doit d’être un... Lire la suite